Bonjour,
Je suis handicapé moteur (Infirme Moteur Cérébral) de 35 ans. Je travaille comme Conseiller Principal d’Éducation après avoir fait des études de droit et de sciences politiques et avoir été pendant plusieurs années collaborateur parlementaire à l’Assemblée nationale et au Sénat (des lieux absolument pas accessibles).
Les normes ne sont parfois pas toujours cohérentes… Dans le cas d’une rampe d’accès, certains magasins préfèrent ne pas en mettre car ils n’ont pas la possibilité de respecter l’inclinaison qui figure dans la loi… Faut-il mieux une rampe que pas de rampe du tout.
De façon générale, lorsqu’on se trouve être en situation de handicap, il faut toujours prouver plus. Les barèmes d’accès aux droits ne sont pas très cohérents… Si on a une CMI avec un handicap reconnu à 80% on a beaucoup de droits qui sont ouverts… Alors que si le degré de handicap reconnu n’est que de 79% là les droits ne sont pas les mêmes (il y en a quasiment beaucoup moins).
S’agissant des MDPH, j’ai l’impression que les situations et les délais sont très variables d’un département à l’autre. Il faut systématiser le « dites le nous une fois » si la situation de la personne handicapée n’est pas évolutive » et systématiser, comme cela se fait par exemple à Paris, la délivrance de droits ouverts sans limitation de durée si le handicap est moteur, depuis la naissance, et qu’il n’a pas de raison d’évoluer.
Dans le cas de ma pathologie, mon médecin ne peut pas me prescrire des séances d’une heure de kiné (la sécurité sociale ne rembourse que des séances de trente minutes). Il faut donc « tricher » et prescrire deux séances d’une demie-heure par semaine pour en faire une d’une heure. Les séances d’une demie-heure ne sont pas cohérentes par rapport à mon besoin.
Je le vois professionnellement, en tant que CPE, l’inclusion scolaire se fait avant tout d’un point de vue quantitatif plutôt que qualitatif. Les personnels notamment enseignants expriment un ras le bol de plus en plus clairs face aux difficultés rencontrées pour gérer l’hétérogénéité des situations. Ils ne sont pas formés de même que l’ensemble des personnels. Il faudrait dans chaque établissement un référent handicap qui ne fasse que ça (au delà du référent MDPH qui est bien seul pour gérer des situations parfois très complexes sur plusieurs établissements). Il faut arrêter avec les mutualisations d’AESH, les rattacher à un seul et unique établissement pour toute l’année scolaire entière (en leur reconnaissant bien sûr un statut de fonctionnaire au sein d’un corps spécifique et la possibilité d’exiser en tant que personnels à part entière (avec un droit dans leur temps de travail pour faire de la coordination avec les enseignants et les parents par exemple). Il ne faut pas oublier par ailleurs de traiter la question de leur formation initiale et continue ainsi que leur évolution de carrière. Sur la problématique des AESH, les établissements bricolent bien trop souvent, et les notifications des élèves ne sont souvent pas respectées.
La question de l’emploi est primordiale. Disons le, encore aujourd’hui, travailler relève du parcours du combattant et on peut comprendre qu’il y ait un coût social supplémentaire au fait de travailler et que ce coût soit trom important « juste » pour travailler comme tout le monde. Je m’interroge par ailleurs. Quel sens y-a-t-il à promouvoir (à raison je le pense), l’inclusion scolaire et donc un développement d’études qui va jusqu’au bac si c’est pour ne pas poursuivre la logique au delà, dans l’enseignement supérieur? Il y encore trop peu d’étudiants en situation de handicap qui peuvent se lancer dans de longues études et obtenir ensuite des postes à responsabilités. Je le vois à travers mon parcours avoir fait des études et être sur des postes lourds avec parfois de l’encadrement d’équipes, relève trop souvent du paranormal.
Il faudrait prévoir la possibilité pour tous les aidants de pouvoir adapter plus facilement leurs horaires de travail et faire en sorte qu’il soit plus facile d’être reconnu aidant (sans avoir à relancer douze mille dossiers).
Le handicap se vit au quotidien. S’il est parfois difficile à vivre c’est aussi la société qui créée elle-même des difficultés supplémentaires. Je crois qu’il est important d’intégrer que la handicap pour tous ceux qui le vivent implique un autre rapport au temps (eh oui, le tiers temps, ce n’est pas que pour les examens!). A ce titre, je suis intimement persuadé qu’il est une opportunité d’interroger nos façons collectives de fonctionner, de penser un autre rapport au temps entre les individus. Un mot quand même (et tant pis si cela rompt mon anonymat), s’agissant de la non accessibilité du Parlement que j’ai vécu en tant que collaborateur parlementaire (j’avais été auditionné en 2017 dans le cadre des travaux sur les conditions de travail des collaborateurs). A l’époque toutes les préconisations étaient impossibles à mettre en oeuvre (heureusement, depuis Monsieur PEYTAVIE est arrivé à l’Assemblée coeur sur vous). Toujours est-il que globalement le Parlement ne respecte pas la loi qu’il a lui-même voté et que les modalités de contrôles et de sanctions sont inexistantes en raison de la séparation des pouvoirs. Il faudrait mettre en place un comité des usagers qui serait chargé de veiller à la bonne mise en œuvre des principes en matière d’accessibilité.