ⓘ Plateforme de témoignage de la mission d’évaluation de l’Assemblée nationale sur la loi du 11 février 2005.

ⓘ Plateforme de témoignage de la mission d’évaluation de l’Assemblée sur la loi de 2005.

il y a 4 semaines

Témoignage de

Laure

Handicap auditif

31 ans, Toulouse, doctorante, sourde signante.

Accessibilité

La situation en France est médiocre, notamment en raison des difficultés à trouver des interprètes pour les cours universitaires. J’ai longtemps lutté avant de m’inscrire dans une université canadienne, où des interprètes à temps plein sont disponibles. J’y étudie à distance, ce qui me permet enfin d’avoir un accès équitable à l’enseignement supérieur. Dans la vie quotidienne, le montant de la PCH (Prestation de Compensation du Handicap) est insuffisant pour couvrir les frais d’interprétation chaque mois. Par ailleurs, bien que je sois curieuse et avide d’apprendre, de nombreuses conférences publiques restent inaccessibles faute d’interprètes en LSF.

Accès aux droits

En tant qu’étudiante au doctorat, mes droits sont bien inférieurs à ceux des autres doctorantes entendantes, notamment en matière d’accès à l’emploi. Je souhaite enseigner, mais mes besoins d’aménagement sont coûteux : par exemple, il me faut un interprète pour dispenser mes cours à des étudiants entendants non signants. Cette barrière financière et logistique limite grandement mes opportunités professionnelles, et la majorité des portes me restent fermées. Les informations sur les podcasts, les télévisions, YouTube, les réseaux sociaux ou lors de conférences n’étaient pas accessibles, car il n’y avait pas d’interprète en LSF. À chaque fois, j’en demandais une. Le problème vient du financement : qui paie ? moi ou eux ? Cela représente un vrai poids psychologique.

MDPH

La PCH apporte une aide modeste, mais elle reste insuffisante pour couvrir l’ensemble de mes besoins. J’aimerais que le gouvernement finance et instaure un véritable accès aux services d’interprétation, notamment dans les services publics, afin de garantir une inclusion réelle des personnes sourdes dans la société.

Instituts et services médico-sociaux

On aurait davantage besoin de professionnels sourds, notamment d’enseignants sourds, afin de mieux répondre aux besoins des personnes sourdes. La communication directe présente de nombreux avantages, notamment en permettant un diagnostic plus précis. La reconnaissance de la LSF en tant que langue à part entière donne aux personnes sourdes la possibilité d’être pleinement considérées comme des citoyens de première classe !

École

L’éducation bilingue en LSF et en français écrit est essentielle pour les enfants sourds signants, ainsi que pour les CODA (enfants entendants de parents sourds), qui ont besoin de s’immerger pleinement dans la LSF. Le bilinguisme offre de nombreux avantages cognitifs et permet aux locuteurs de mieux s’intégrer à la société ; c’est une véritable richesse. Avant de rejoindre une école bilingue à Toulouse, j’ai fréquenté plusieurs établissements. Mon intégration y était difficile, car je manquais d’un véritable accès à la langue. Par la suite, j’ai été scolarisée dans une école spécialisée où l’on infantilise les enfants sourds, les considérant comme des citoyens de seconde zone avec un niveau d’éducation très bas. Face à cette situation, mes parents ont choisi de me scolariser dans un dispositif bilingue, encore rare en France. Aujourd’hui, il existe une dizaine d’écoles proposant un cursus bilingue LSF/français écrit, de la maternelle au lycée, avec un accès au baccalauréat. Je suis entrée dans une école LSF à l’âge de 7 ans, un peu tard pour rattraper mon retard linguistique. Pourtant, ce fut une véritable révélation pour moi. Malheureusement, les classes en LSF restent fragilisées par un manque de reconnaissance et de nombreux préjugés. La majorité des enfants sourds sont intégrés dans des classes avec des entendants et contraints d’oraliser, ce qui a un impact profond sur leur vie sociale et leur santé mentale. De nombreux témoignages, notamment dans l’émission L’Oeil et la Main, ainsi que des études scientifiques, démontrent l’importance de la LSF dans le développement des compétences langagières des enfants sourds. La LSF étant leur langue naturelle, elle facilite leur intégration sociale et professionnelle. Pourtant, l’identité sourde est encore trop souvent opprimée dans une société qui privilégie l’audition au détriment de la reconnaissance des langues signées.

Emploi

Même chose que les précédentes.

Proches aidants

Les personnes valides, au contraire, ont besoin d’être formées, de mieux comprendre la diversité des besoins et de prendre conscience de leur position privilégiée. Elles peuvent ainsi devenir de véritables alliées pour un changement structurel. Elles ne sont pas de simples « proches aidants », mais des acteurs du changement, contribuant à déconstruire une vision profondément validiste de la société. L’objectif est de bâtir un monde plus humain, où la diversité capacitaire de chacun est respectée. Le handicap n’existe pas en soi : il est le produit d’un esprit étroit et d’un manque d’adaptations.

Autres remarques

Merci de rendre ce questionnaire plus accessible à l’avenir. Il est important de prendre en compte que certaines personnes préfèrent s’exprimer en LSF, leur langue maternelle.
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